L’art urbain : #Episode2 : Karcher, PCB, Ken Saro, Les Plateaux : montrer le graffiti
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Ecrire, peindre sur un mur est interdit sans autorisation en France. C’est lié à la propriété privée. Un mur appartient à son propriétaire, son usage exclusif aussi.
Les murs à programmation sont une expérience parmi d’autres de commun dans le 20. L’idée est de mettre à disposition des murs appartenant à la Mairie du 20 ou à des équipements de la Ville de Paris aux artistes d’art urbain.
Bref, d’en retrouver un usage commun.
Un équilibre artistes / riverains par le dialogue
Une question s’est posée tout d’abord : fallait-il laisser ces espaces totalement libres ? Qui peindrait dessus ? A quel rythme ? Avec quelle co existence avec les riverains ? L’expérience du dépôt de bus Lagny nous avait montré qu’on pouvait difficilement laisser un espace sans régulation à proximité des habitations, sans que les nuisances deviennent supérieures à l’apport de beauté du graffiti. Dans une ville dense comme Paris, trouver le juste équilibre entre des espaces pour le graffiti et l’acceptation des riverains est essentiel.
A ce moment-là, j’ai rencontré Rero qui coordonnait un festival de graffiti chez nos voisins des Lilas et qui cherchait un mur de l’autre côté du Périph pour faire le pont. Il proposait d’inviter quelques artistes d’art urbain, comme Speedy Graffito, pour l’occasion. J’aimais l’idée que le 20e s’intègre dans le festival porté par les Lilas qui allait montrer différents styles de graffiti, d’artistes émergents à d’autres plus confirmés.
La Mairie du 20 a donc mis à disposition le mur du square Henri Karcher (je sais, le nom est incroyable pour un mur de graff…). Plusieurs questions se sont alors posées : est-ce que la mairie allait faire la programmation artistique ? Est-ce elle qui allait assurer la production ? Avec quelle légitimité et quelles compétences ?
Art Azoï : une association pour l’art urbain
A ce moment-là, une association est née dans le 20e, avec la vocation de développer l’art urbain. Elle se nomme Art Azoï, défend l’exigence artistique parce qu’un mur dans l’espace public est vu par tout le monde, défend la reconnaissance des artistes d’art urbain, notamment par les politiques publiques. Cela passe par leur valorisation, la rémunération de leur travail comme pour toute commande publique, de bonnes conditions de création. Elle défend l’art à portée de tous et toutes : chaque mur donne lieu à des échanges avec les passants, les curieux, les sceptiques.
Et en 2010, il y en avait des sceptiques.
Si certaines galeries commençaient à faire le pari de l’art urbain, le graffiti était encore vu comme un délit plus que comme un art.
Alors nous avons choisi de montrer sa diversité, sa richesse, du figuratif à l’abstrait, au lettrage très hip hop à la calligraphie, du vandale à l’étudiant en école d’art. Pour cela, nous avons testé un nouveau modèle à Karcher : confier la programmation artistique d’un mur à une association spécialisée et financer la production ainsi que la rémunération des artistes.
Une création différente par trimestre attendue par les riverains!
La première fois que le mur Karcher a été repeint, j’ai reçu des courriers d’habitants furieux que la mairie recouvre de blanc, efface les graffiti qui étaient là depuis 3 mois. Désormais, ils savent que tous les 2 mois, ils peuvent découvrir une création différente. Parfois, ils aiment beaucoup et souhaitent qu’elle reste plus longtemps. Parfois, ils aiment moins. Certains sont devenus experts, reconnaissant des styles, des artistes. L’école la plus proche organise parfois des sorties lors de la réalisation pour qu’enfants et artistes se rencontrent.
Suite à cette expérience, d’autres murs à programmation ont vu le jour dans le 20e : le mur du Pavillon Carré de Baudouin qui change 3 fois par an pour annoncer chaque nouvelle exposition, artiste de la rue étant invité à répondre à l’artiste du dedans ; le mur du centre Ken Saro Wiwa, qui propose en plus des master class ; plus récemment le mur des Plateaux Sauvages.
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